Une pilote d'exception dans le ciel indochinois
Son parcours hors du commun a inspiré des générations d’Aviatrices et d’Aviateurs : Valérie André est l’une des figures incontournables de l’histoire aéronautique nationale. Retour sur ses premières missions en Indochine : le capitaine André s’y emploie alors à évacuer par hélicoptère les soldats blessés et fait la démonstration de son courage et de son abnégation.
En 1948, Valérie André soutient sa thèse de doctorat en médecine aéronautique. Cette jeune femme, née en 1922 à Strasbourg, nourrit le secret espoir d'assouvir sa passion : le métier d'aviateur militaire alors interdit au personnel féminin.
Cette fascination pour le pilotage l'anime dès sa plus tendre enfance. Elle débute par un rêve qu'elle fait à l'âge de dix ans. Valérie André se souvient : « J'étais dans l'espace, tout était noir, sombre et j'étais comme un bolide au milieu d'autres bolides qui se croisaient, qui risquaient de s'entrechoquer, mais c'était incroyablement agréable. Toute petite fille, quand je voyais voler les avions, je disais à mes parents : Je serai aviatrice. »
Toute petite fille, quand je voyais voler les avions, je disais à mes parents : "Je serai aviatrice."
Durant son adolescence, elle voue également une admiration pour ces femmes qui, pendant l'entre-deux-guerres, se lancent à la conquête des airs. Elle suit avec attention le parcours d'aviatrices d'exception – comme « les deux Maryse » (Bastié et Hilsz) ou Hélène Boucher qui, au début des années 1930, fait tomber de nombreux records aériens. Elles démontrent qu'elles n'ont rien à envier de leurs homologues masculins et s'imposent rapidement comme des modèles pour la jeune Valérie André.
Au cours de son cursus de médecine à l'université de Paris entamé après guerre, elle rend visite avec le professeur Léon Binet – le doyen de la faculté – aux blessés de la 1re armée du général de Lattre de Tassigny. Elle assure aussi l'encadrement médical d'une préparation militaire parachutiste en 1947 et profite de cette occasion pour effectuer ses premiers sauts.
Alors que la France amorce sa lente reconstruction après plusieurs années de conflit, le pays se trouve confronté à un nouveau théâtre d'affrontements en Extrême-Orient. Fin 1946 commence la guerre d'Indochine qui oppose l'armée française au mouvement Vietminh dirigé par Hô Chi Minh.
En 1948, pour faire face à la demande accrue en médecins militaires, le doyen de la faculté de Paris propose à ses élèves de signer un engagement dans l'armée et d'embarquer ensuite pour l'Indochine. Sans aucune hésitation, Valérie André décide de rejoindre le Service de santé des armées.
Le capitaine médecin André s'envole pour l'Extrême-Orient le 9 janvier 1949. Elle est tout d'abord affectée à l'hôpital My Tho dans le delta du Mékong avant de rejoindre, dès le 5 février suivant, la capitale, Saigon, et le service neurologique de l'hôpital Costes.
Forte de son brevet de parachutisme obtenu quelques années auparavant, elle se porte de nouveau volontaire pour soutenir les postes isolés du front qui peuvent n'être ravitaillés que par les airs. Dans les semaines qui suivent son arrivée, elle e ectue sa première mission parachutée sur le Laos afin de pouvoir prodiguer les premiers soins aux blessés de guerre.
Au tournant des années 1950, l'armée acquiert des hélicoptères légers Hiller 360. Ces appareils sont mobilisés dans diverses missions : observation de l'ennemi, réglage des tirs d'artillerie, mais également opérations d'évacuation des blessés. En effet, la végétation luxuriante de l'arrière-pays indochinois complique l'emploi des avions de transport sanitaire qui ne disposent pas de pistes d'atterrissage suffisamment dégagées. Les hélicoptères sont donc intensivement utilisés durant le conflit.
Ces merveilleuses petites machines semblables à des libellules
Le 14 avril 1950, le Service de santé des armées acquiert ses deux premiers Hiller 360 UH destinés à l'armée de l'Air. À bord de ces appareils, le capitaine André est rapidement séduite par « ces merveilleuses petites machines semblables à des libellules ». Elle finit même par obtenir l'accord de sa hiérarchie pour suivre un stage de pilotage en France. Plusieurs années après la guerre, elle se remémore ce moment charnière de sa carrière : « Tu es médecin. Le corps expéditionnaire en Indochine en manque et tu t'engages encouragé par ton "patron" le Pr Binet. Titulaire du brevet militaire de parachutisme, tu t'attelles à la chirurgie de guerre : 150 interventions en un mois. Mais voilà qu'apparaissent dans ton horizon deux hélicoptères Hiller 360 dont tu saisis immédiatement l'importance pour l'évacuation rapide des blessés dans une guerre comme celle que mène la France en Indochine. Tu seras pilote d'hélicoptère. »
En mai 1950, après avoir terminé sa formation de pilote, elle retourne en Indochine pour reprendre ses activités. Finalement, c'est en mars 1952 que le capitaine André – dont l'indicatif de vol est « Ventilateur » – réalise ses premières missions aux commandes d'un hélicoptère. Elle se familiarise ensuite avec le pilotage d'un nouvel appareil, le Westland Sikorsky WS-51 qui permet l'évacuation de quatre blessés (le Hiller n'en emportait que deux sur ses patins atterrisseurs).
Son calme et sa détermination forcent l'admiration des combattants. En effet, lors des opérations aéroportées qui se déroulent parfois sous le feu ennemi, il faut poser l'appareil, puis, rotor tournant, ouvrir les paniers pour y installer les blessés pour et enfin redécoller en prenant garde au personnel resté au sol. Outre les vicissitudes des combats, la capitaine André doit également affronter les difficultés du climat tropical, la chaleur, les pluies et les maladies.
Servir dans l'armée impose un désintéressement total, un esprit de dévouement, un sens de la solidarité constant.
Malgré les risques qu'elle prend (entre le 16 mars et le 11 décembre 1952, son appareil est touché sept fois), Valérie André mène sans relâche sa mission. Elle affirme avec modestie : « Servir dans l'armée impose un désintéressement total, un esprit de dévouement, un sens de la solidarité constant. On ne saurait s'accorder des délais de réflexion, des états d'âme, des replis sur soi trop longtemps, sans risquer de perdre le goût de l'aventure. »
En avril 1953, elle quitte l'Indochine, avec à son actif 120 missions de guerre et 300 heures de vol, 22 sauts en parachute et surtout le sauvetage de 175 blessés.
Après l'Indochine, Valérie André servira en Algérie avant de retourner en France et d'occuper plusieurs fonctions au sein de l'armée de l'Air – notamment sur la base aérienne de Villacoublay où elle occupera les fonctions de médecin chef puis de conseillère auprès du Commandement du transport aérien militaire au début des années 1970.
En avril 1976, elle accède au grade de médecin général et devient la première femme à intégrer le corps des officiers généraux. En 1981, elle est promue médecin général inspecteur avant de quitter l'institution militaire. Cette nomination vient clore et souligner un parcours d'exception qui continue, encore aujourd'hui, d'être cité en exemple.
Article paru dans Air Actualités n°767 - mars 2024
Directeur de Projets, Chef de Projets Informatiques
6 moisUne femme d'exception
responsable support programme chez Sabena technics
6 moisIntéressant
BTP
6 moisRip Mme
Consultant chez L'Orient
6 moisInstructif
Directeur Gestion des risques et Directeur Conformité.
6 moisBravo à l'armée de l'air qui a été à la hauteur de l'évènement. Merci à tous ceux qui ont œuvré pour que la cérémonie aux Invalides comme sur la BA 107 Villacoublay soit un succès. Moment d'émotion et de dignité comme l'aurait aimé notre général ! Bravo encore.